Des races
Il y a une quinzaine d'années, un ami à moi est parti enseigner le français dans un pays du Proche-Orient. En préparation de cette mission, il a passé quelques mois à étudier la langue arabe… et à se laisser pousser une énorme moustache. Parce que dans cette région du monde, il tombe sous le sens que les hommes portent une énorme moustache tout comme dans d'autres régions du monde, il tombe sous le sens que les femmes portent des jupes.
Un soir qu'il rentrait chez lui à Paris, il s'est fait casser la gueule dans le métro. Les échanges verbaux précédant l'agression ne laissent aucun doute sur sa motivation raciste. Peu importe que cet ami soit châtain clair et qu'il ait les yeux bleus ; un moustachu qui lit un bouquin en arabe, c'était forcément louche, c'était forcément pas un bon Français bien de chez nous.
Le racisme n'a rien à voir avec la notion même de race. Ce n'est pas à cause de sa race que mon ami s'est fait agresser, et ce n'est pas en expliquant aux flics qu'il n'y a pas de différence génétique significative entre les Noirs et les Blancs qu'on mettra fin aux contrôles au faciès. Le racisme n'est pas une affaire de génétique mais d'intolérance à la culture de l'autre. Supprimer le mot race de la Constitution, faire intervenir des scientifiques dans tous les médias pour démonter les propos de Nadine Morano en expliquant que les races humaines n'existent pas, le re-tweeter trente-cinq fois par jour, c'est bien gentil, mais c'est complètement hors sujet.
Et d'ailleurs, même dans l'hypothèse où la génétique révèlerait l'existence de races humaines, le racisme n'en serait pas moins inacceptable.
Le problème est sociologique, politique, moral. Alors foutez-nous la paix une bonne fois pour toute avec vos considérations biologiques.