Faites entrer l'accusé
J’ai toujours pensé que Faites Entrer l’Accusé était une émission radiophonique qui avait par erreur échoué à la télévision. Il n’y a jamais rien à montrer, dans ce programme, puisque par définition, on ne possède pas d’images du crime en train d’être commis ou d’interview de la victime ; tout au plus possède-t-on quelques extraits du journal télévisé de l’époque, quelques photos de famille, voire dans le meilleur des cas, quelques vagues images floues surprises par une caméra de vidéo-surveillance.
L’essentiel de l’émission se passe donc à l’oral : interview des proches, des témoins ou des enquêteurs, narration de l’animateur ou de l’animatrice, discussion avec les experts… Tout le reste n’est qu’illustration laborieuse, le plus souvent au premier degré. L’assassin a utilisé un couteau ? Gros plan sur un couteau. La victime perd conscience ? Image qui vacille et caméra subjective qui tombe au ras du plancher. L’assassin s’est nuitamment enfui en voiture ? Route qui défile dans les faisceaux des phares. La susdite voiture a été aperçue dans une station service ? Travelling sur une pompe à essence. L’assassin habite à Jouy-lès-Sylvettes ? Plan fixe sur le panneau routier de Jouy-lès-Sylvettes.
Du coup j’ai tendance à regarder cette émission comme j’écoute une émission de radio, affalé sur le canapé sans regarder l’écran. Surtout que Christophe Hondelatte et Frédérique Lantieri ont une déclamation radiophonique fort agréable, bien éloignée de l'insupportable ton journalistique habituel. Mais évidemment, affalé sur le canapé à fixer le plafond… à rêvasser… un dimanche soir… dans la pénombre… bercé par une belle voix qui me raconte une belle histoire… je m’endors comme une masse au bout d’une demi-heure.
Vous n’imaginez pas le nombre d’affaires criminelles passionnantes dont je ne connais pas le dénouement. Vous n’imaginez pas à quel point l’apparition du replay de France 2 a changé ma vie.