Navigo
J'ai besoin d'un passe Navigo. Naïvement, je me suis donc présenté muni de mon vieux passe à l'agence commerciale idoine, demandant qu'on me le réactive. Impossible, me répondit le guichetier : mon passe a été désactivé il y a plus d'un an, or voyez vous, on ne peut pas réactiver un passe désactivé depuis plus d'un an. Oui c'est n'importe quoi. Non, on ne peut rien faire.
De retour à la maison, je me connecte au site du STIF, cet organisme qui emmerde tout le monde depuis dix ans avec ses règlements débiles qui réalise tant de bonnes choses pour les usagers. J'apprends donc qu'il y a deux modèles de passe Navigo. Alors attention, hein. Techniquement, ce sont exactement les mêmes. Une carte en plastique avec votre photo et votre nom imprimés dessus et une puce RFID à l'intérieur. Mais commercialement, ça n'est pas du tout la même chose. Il y a le passe Navigo Intégrale (oui, il y a une faute d'accord, preuve irréfutable que le STIF est contaminé par la théorie du genre) qui sert uniquement pour les abonnements annuels, et le passe Navigo normal, qui sert uniquement pour les abonnements mensuels ou hebdomadaires. On ne peut pas mettre un abonnement annuel sur une carte destinée aux abonnement mensuels et inversement. Enfin techniquement, si, puisque ce sont les mêmes cartes. Mais en pratique, on ne peut pas. C'est interdit. Pourquoi ? Parce que.
Me voilà donc à devoir commander un nouveau passe Navigo sur internet – alors que j'en possède déjà un en parfait état. Il faut prouver que l'on habite en région parisienne – il ne faudrait pas que les bouseux de province bénéficient de la technologie de pointe qui se cache dans le Navigo, hein. Il faut fournir une photo d'identité aux normes (délirantes) qui vont bien, ses noms et prénoms, sa date de naissance… Les fiches anthropométriques de la Police Nationale sont probablement moins précises. C'est qu'autoriser n'importe qui à prendre le métro pourrait compromettre la sûreté nationale ! On ne rigole pas avec ces choses-là. Quoi qu'à bien y réfléchir, ça ne doit pas être une question de terrorisme, puisque ce problème-là est déjà résolu par les adolescents pré-pubères qui patrouillent en treillis dans toutes les gares avec un FAMAS non chargé au poing. Bref. Une fois sa fiche de renseignement remplie, il faut encore patienter plusieurs semaines avant de recevoir le passe convoité dans sa boite aux lettres. Le temps que la DCRI vérifie tout, je suppose.
Pendant ce temps à Londres, acheter une Oyster Card prend environ quarante-cinq secondes, puisqu'il suffit d'introduire sa carte bleue dans les distributeurs automatiques qui se trouvent en station. N'importe qui peut en avoir une (la preuve : j'en ai une), il n'y a ni photo ni nom ni prénom dessus, ça fait exactement ce qu'on lui demande sans prendre la tête de l'usager avec des procédures administratives dignes de l'ex-bloc soviétique : ça permet de prendre le métro. Point.
Mais j'imagine que les Français ne sont pas prêts à accepter un système aussi simple et aussi efficace.