À la Poste
Une fois de plus, le facteur n’a pas sonné et s’est contenté de laisser un avis de passage dans la boîte aux lettres. Il n’a même pas daigné y cocher l’une des trois cases prévues pour expliquer la raison de la non-distribution du colis. Normal : aucune n’aurait convenu, je n’étais pas absent, ma boîte aux lettres est bien normalisée, ma sonnette est parfaitement accessible et fonctionne.
Aussi me permets-je respectueusement de suggérer à l’administration des postes de revoir la forme des avis de passage afin d’y ajouter la case suivante, probablement plus adaptée à la réalité actuelle du terrain :
Suite à la privatisation de nos services, notre paradigme n’est plus de rendre service aux usagers mais de maximiser les profits de nos actionnaires. Ceci passant par une réduction drastique du nombre de facteurs et par le remplacement des fonctionnaires assermentés par des vacataires incompétents, vous comprendrez que nous n’avons vraiment ni le temps ni l’envie de monter frapper à votre porte pour vous remettre votre colis en main propre. (Et ce, même si nous nous engageons à le faire dans les conditions générales de vente de notre service Colissimo, même si votre colis contient des objets périssables, même si vous aviez pris votre matinée de boulot pour attendre ce colis urgent.) Merci de venir faire une heure de queue samedi matin pour venir chercher votre colis de merde vous-même au bureau désigné ci-contre.
Bon, d'accord, c'est un peu long pour figurer sur l'avis de passage, mais en écrivant avec des petits caractères, non ? Et sinon, je voudrais aussi signaler que le type qui a pondu la nouvelle organisation des bureaux de poste est un grand psychopathe.
Tactique classique. On prend un service public qui marche bien, puis on le réforme (au prétexte de le moderniser) de telle sorte qu’il ne marche plus. Les usagers râlent, trouvent insupportable cette situation de monopole qui les oblige à dépendre d’un service devenu pourri, exigent l’ouverture à la concurrence. Et on privatise, avec l’assentiment général, un service que tout le monde, dix ans plus tôt, refusait catégoriquement de privatiser.
Le pire, c’est qu’on se fait avoir à chaque fois.